i'm blonde, i'm skinny, i'm rich, and i'm a little bit of a bitch ★
Extrait du journal d'une domestique de la maison Iwasa.

  « Monsieur est encore parti, me laissant soin de m'assurer que sa fille ne manque de rien. Ce n'est pas une tache aisée pour une femme comme moi de m'occuper d'elle. N'ayant pas d'enfant je n'ai aucune expérience maternelle et cette fille n'est pas des plus aisées à comprendre. Elle est pleine de contradictions et pourtant dire qu'elle joue un quelconque double jeu serait mal venu. Car j'ai la sensation que ce n'est pas le cas. Que si elle se comporte comme elle le fait avec moi c'est parce qu'habituée à ma présence elle a l'impression qu'elle peut se laisser aller. Arrêter de jouer aux dures. Je le sais pour la voir avec d'autres et à la maison.

  Elle est toujours souriante. Un sourire qui éclaire son visage. Aux airs terriblement sincères comme s'il venait du plus profond de son cœur. C'est sans doute le cas mais je sais par expérience que même quand elle n'a pas l'humeur à rire elle ne s'en défait pas tant qu'elle n'est pas seule. Elle ne pleure presque jamais. Je ne me souviens même plus de la dernière fois où je l'ai vue faire.
  Elle est avenante, sait comment s'y faire pour donner confiance aux autres. Mais je crois que parmi ceux qu'elle fréquente il n'y en a que peu qu'elle considère vraiment comme ses amis. Je pense que d'une certaine façon elle a peur de s'attacher. Sans doute à cause de monsieur, il a toujours rejeté l'amour qu'elle voulait lui témoigner, elle doit s'imaginer qu'avec les autres se sera pareil et ferme son cœur avant d'être jetée. Si vous voulez mon avis c'est bien triste.

  Mais au moins elle a les pieds sur terre, on ne peut pas nier que ce soit une qualité dans ce monde là, réaliste, un peu trop, bien souvent cela tourne au sarcasme. Elle peut balancer des remarques blessantes mais empruntes de vérité sans se dévêtir de son calme. Ni se soucier de l'impact de ses paroles.
  Ce calme, toujours, on ne dirait qu'elle ne veut rien laisser l'ébranler, je crois que c'est également la raison pour laquelle elle a besoin de se sentir jolie, bien habillée, comme si c'était une enveloppe de protection cachant un feu tourbillonnant.

  Car elle a du caractère. Elle peut même avoir sale caractère quand elle s'y met. Rancunière et têtue. Et détestant s'excuser ou ne pas avoir le dernier mot. Elle ne reconnaît jamais ses torts. Un peu comme monsieur. Il vaut mieux ne pas se la mettre à dos. J'ai vu quelques uns de ses camarades la mettre en colère. Elle ne se fâche pas, aucune crise, pas de mots blessants, elle les ignore. C'est aussi simple que cela. Un peu comme son père fait avec elle. C'est comme s'ils n'existaient plus. Et rien ni change. Une volonté de fer.

Je ne sais pas ce qu'elle veut, plus tard, à l'avenir, elle ne se confie pas vraiment à moi, je crois qu'elle est plus du genre à écouter qu'à s'attarder sur elle même. Pourtant elle peut s'avérer très égoïste. Pensant à son confort avec celui des autres. Égoïste mais pas égocentrique.
Quoi qu'elle souhaite je suis sure qu'elle l'obtiendra. Car elle a de l'ambition. Pas cette petite touche de rêve qui vous porte et vous guide. Non un désir ardent de réussir. Elle ne supporte pas l'échec. Cela l'anéantit. Alors elle se débrouille pour faire de son mieux pour réussir. Travaillant avec sérieux et application. Ce n'est pas rare de la voir errant un livre à la main, absorbée par sa lecture.
Quelques fois elle va même jusqu'à profiter de son entourage. Je l'ai vu faire même si je n'ai rien dit. Elle sait là où sont ses intérêts, joue de son charme pour obtenir ce qu'elle veut. Et beaucoup se laissent faire. Je ne sais même pas s'ils s'en rendent compte. Pourtant elle ne fait même pas ça dans leur dos, non on ne peut pas lui reprocher un quelconque manque d'honnêteté, elle sait juste s'y faire. Papillonner avec grâce pour faire ce qui lui chante. D’ailleurs je plains celui qui s'y prendrait à essayer de lui donner le moindre ordre, à essayer à la plier à sa volonté. »
   



its my life ★                                                                                                                

  Je l'ai reçue, cette lettre dont l'attente c'était faîte longue agonie. Elle est arrivée. Ce matin même. Par ce noble hibou aux allures de colombe. Apportant un message de paix. De libération après des années d'emprisonnement dans cette cage dorée et magique.
  Vous ne serez sans doute pas revenu de votre voyage à l'étranger avant mon départ pour Wizasureru, et cela sans doute nous convient à tous les deux, aucun essai si peu sincère et maladroit  d'un quelconque adieu. Adieu qui nous va très bien à l'un comme à l'autre. Ce ne sont pas des paroles pleines de profondes reproches. Plutôt un apport de vérité dans cette illusion qui a maintenue en paix le fragile équilibre de la demeure.  

  Je ne dis pas avoir été malheureuse, j'ai eu ce que bien nombres n'osent même pas rêver. Vous m'avez apportée une vie aisée, j'ai toujours été gâtée. Bien vêtue, tous les livres que je désirais, les jouets qui me lassaient parfois si vite. Une éducation des plus soignées. Dans cette grande maison. Peut-être un peu grande pour une enfant et ses domestiques. Même si pendant longtemps je l'ai vue comme un palais à explorer. Chaque dalle renfermant, je le croyais un passage-secret que je ne cessais de chercher. Ce grand jardin où j'aimais et où j'aime encore me promener. Admirant les fleurs. Les roses étaient mes préférées. Belles, somptueuses, les jardiniers en prenaient grand soin, mais ne s'en approchaient jamais trop près. D'une certaine manière je me retrouvais en elles, vous faisiez tout pour moi, je grandissais et m'épanouissais tout comme elles mais jamais vous ne vous êtes approché de moi. Comme si cela vous aurait fait souffrir aussi surement qu'une épine.
  Mais grâce à vous je possède ce patrimoine que je sais inestimable. Partout où j'irai dans le monde sorcier, je sais que je serai connue comme votre fille et comme celle de mère. Comme une sorcière de sang pure, d'un des plus anciens et respectables clans japonais. Et sachez que je ne ferais en aucun cas honte à ce nom que j'estime à sa juste valeur.  

  Mais si je n'ai pas été malheureuse, je n'ai pas été aussi heureuse que je l'aurai voulu. Futiles et égoïstes sentiments, peut-être est-ce ainsi que vous verrez les choses. Mais j'ai commencé cette lettre avec l'intention de vous dévoiler le fond de ma pensée. D'en arrêter avec cette illusion qui persiste depuis nombre d'années. Pour ne pas regretter plus tard de ne pas avoir évacuer ce que je ressentais.

  Ne pouviez-vous donc pas me montrer clairement l'étendue de la haine que vous éprouviez à mon égard père ? Ne pouviez-vous pas tout simplement me cracher cette antipathie que vous ressentiez pour moi ? Vous laisser aller à m'injurier, à me frapper. Me dévoiler le fond de votre pensée. Sans doute aurait-ce était là un bien mauvais traitement, mais je me connais et je sais que j'y aurais survécu, que j'aurai trouvé le moyen d'y échapper. Mais je crois que j'aurai préféré cela à ce profond silence. Cette muraille inaccessible que vous avez instauré entre nous. Ces quelques paroles prononcées en société quand les bonnes manières vous y obligeaient. Pour retourner à cet insupportable habitude de faire comme si je n'étais pas là de retour à la maison. Profiter de chaque occasion pour quitter la maison, pour ne pas me voir.
  Parce que ce traitement impliquait que j'ai toujours ce petit espoir, bien que s'il diminuait avec le temps, il ne disparaissait jamais entièrement. Cet espoir qu'un jour le mur s’abattrait et que vous me montrerait une forme d'amour que l'argent ne peut compenser.
  J'ai brillé. Tous les professeurs que vous avez engagé m'ont décrite comme d'une grande intelligence. Je me comportais bien quand nous devions accomplir ces visites de courtoisie propres aux familles comme la notre. Bien habillée, élégante, polie, cultivée. Mais tous mes efforts n'ont jamais semblé vous atteindre.

  Je sais bien sur les raisons qui vous poussent à vous comporter ainsi avec moi. Je lui ressemble n'est-ce pas ? La forme de mes lèvres, la lueur qui brille dans mes yeux, jusqu'à mon sourire, tout vous la remémore. Mère. Vous ne pouvez pas me regarder sans penser à elle. Sans me détester en vous rappelant ce que je vous ai arraché en venant au monde. Une femme morte en couche. C'est forcément de la faute de l'enfant qu'elle tentait de mettre au monde. La sienne et celle des médecins. De simples moldus. Incompétents moldus qui vous ont arraché la femme que vous aimiez. Peut-être  auriez-vous voulu que moi non plus je n'y survive pas. Vous laissant ainsi la possibilité de refaire votre vie. Parce que je suis un pont entre elle et vous. Entre ce que vous avez aimé et ce bonheur futur que vous aviez prévu de construire à deux mais qui n'est plus accessible.

  Mais peu importe. Je vais quitter cette bâtisse où j'ai grandi. Et je ferai mon possible pour ne plus jamais ressentir cette sensation de ne pas être à la hauteur. La rose pleine d'épines que vous n'osiez approcher deviendra un diamant convoité.

  Bien entendu je jetterai cette lettre au feu, avant de partir et que vous n'ayez l'occasion de la lire, elle en dit trop. Je crois que pendant un bref instant j'avais besoin d’épancher ce que j'ai tu. Mais je ne supporterai pas de me montrer aussi faible face à vous. Après tout et malgré tout, de ce côté là nous nous ressemblons sans doute un peu.