La chaire de la brioche était tendre, aérée, toutes ces petits alvéoles qui donnaient de l'épaisseur à la pâte une fois cuite, un vrai régale pour les yeux autant que pour le palet, une fois qu'on croquait dedans on ne pouvait que sourire. Les cristaux de sucre se dévoilaient à la seconde bouchée rendant ce seul dessert que Su'en affectionnait encore meilleur. Le brun aurait été capable d'en manger une bonne dizaine, l'assiette entière même mais pas ce soir, pas à ce moment alors qu'un si jolie fille avait accepté de partager son diner en sa compagnie.
La regarder mangeait s'était un peu comme assister à une démonstration de bienséance, tout était si délicat, son port de tête, sa stature droite mais non rigide, le mouvement de sa fourchette qu'elle portait à ses lèvres, un rire clair ajouté n'aurait fait que parfaire ce tableau si agréable à contempler. Même l'observer assise à une table n'était pas ridicule, dénué d'intérêt cette jeune fille était la représentation même de la grâce, sa froideur n'étant qu'un plus à la rendre inaccessible.
Sa voix était une douce mélopée à laquelle Su'en aurait pu devenir accro, l'entendre encore et encore, en boucle si possible à n'importe quel moment de la journée. Au réveil le matin, lorsque avec un sourire elle lui aurait souffler de sortir du lit, le midi, alors qu'il aurait la tête dans ses livres, elle serait là à lui rappeler qu'il était grand temps d'aller manger calmer les cris de cet estomac mal-traité et puis le soir, quand éreinté il regagnerait sa chambre, elle aurait été là à lui souffler chaudement au creux de l'oreille que le repos était mérité, que son étreinte était requise qu'elle s'abandonnait à lui.
Doux rêve éveillé qui garda en haleine les gestes du métisse. Reprenant ses esprits il libéra ses deux couverts au fer marqué de buée sous la pression exercée par ses phalanges mates, ils teintèrent en rencontrant le rebord en argent plaqué de l'assiette ronde et oscillèrent un moment avant de s'immobiliser.
"Mao...Ma-o? Comme ça?"Il ne s'intéressait pas à la chose mais sans comprendre pourquoi, comme naturellement il s'était mis à appliquer les conseils de la jeune fille, accentuant bien avec sa langue pour recréer le même son. Un petit sourire étira ses lèvres fendue par une cicatrice sur toute la longueur du philtrum. Elle n'était pas très visible, il fallait s'approcher très prés pour l’apercevoir mais son dessin était bien encré dans la chair, déformant légèrement le cœur de la lèvre. Cha Yi répéta encore une fois le nom de son matou et Su'en acquiesça alors, tout en attrapant une autre viennoiserie manie qu'il avait pour se donner bonne figure.
"Je n'ai pas d'animaux parce que je ne les aime pas."Su'en ne pouvait allait à l'encontre de ce qu'il était, il ne pouvait faire autrement que de dire les choses telles qu'elles étaient et comme elles lui venaient à l'esprit. Il ne tergiversait jamais sur un sujet même concernant le plus délicat: celui qui traitait de son histoire personnelle. Su'en ne faisait aucune exception, il gardait ce même timbre pour tout, les aveux douloureux, les critiques et même pour les marques de sympathie.
Il ne pu cacher son étonnement lorsque la jolie chinoise lui fit part de son point de vue et admiration à propos de sa famille et de son nom. Elle n'était au courant de rien ou de pas grand chose mais cela suffisait à l'émerveiller, à la rendre envieuse. Ce sentiment de fierté retrouvé était étrange, vraiment nouveau mais Su'en su parfaitement l'apprécier, il sourit cette fois plus franchement, lui adressant un regard reconnaissant.
"
Zhang...Cha Yi" pour commencer il le répéta comme elle venait de le prononcer puis poursuivit, tranchant en deux son appétissant pain au lait.
" Je suis fier de tout ce que les miens m'ont légués mais je dois également tracer ma propre route pour redorer ce blason si ancien. Ta tâche est rude, la mienne ardue mais il ne faut jamais perdre espoir. Je ne crois pas au destin, rien n'est écrit c'est à nous de le faire. "Il était déterminer à faire couler l'école entière, à pendre tout ces professeurs au bout de cordes rugueuses et solidement nouées à leurs cous grassouillets et blanchi par des cols qu'ils ne méritaient pas. Tout le monde cachait une part plus sombre, certains arrivaient à la dissimuler jusqu'à la fin de leur vie sans jamais éveiller de soupçon mais cette habilité était mise à mal par le regard accusateur de Su'en. Il était capable de voir, de débusquer cette noirceur enfouie, il n'avait peur de rien ni de personne il était lui même un monstre. ça nature voulait qu'il reconnaisse les siens et les élimines, Su'en devait être le seul et l'unique entouré de simple brebis sans défense.
Tuer l'autorité de l'école était un bon début, la première action à accomplir pour que le piège se referme sur l'école entière et la face disparaitre à tout jamais.
Le plan était plutôt bien ficelé, il y songeait depuis maintenant cinq ans et bien avant encore mais il n'était pas borné au point de le croire infaillible, il avait encore besoin de préciser les choses, de peaufiner l'ensemble avant de se mettre en marche.
"De toute cette école, tu es la première a qui je parle autant. En cinq années. Tu peux ne pas me croire, tu peux même n'en avoir rien à faire mais c'est un exploit et cela démontre que tu es bien plus qu'une jolie fille. Tu es intéressante, tu es intelligente. Je crois que tu arriveras sans peine à guider les autres là où tu le souhaiteras alors ne sois pas si difficile avec toi même."ça ne lui allait tellement pas au teint, ses orbes noires n'étaient pas fait pour refléter l'échec, cette fille devait briller assoir son pouvoir elle était la digne héritière du nom Jegal, elle était celle qu'il s'était choisi. Su'en était patient quand il le fallait, Su'en savait attendre et il était prés à patienter encore deux longues années, jusqu'à la fin de ses études. Si la demoiselle ne s'avouait pas conquise alors il n'aurait aucune pitié à la laisser périr entre les murs de l'école, quand il y mettrait le feu un sourire aux lèvres. La perche qu'il lui tendait était donc la seule sur le long terme qu'elle recevrai, sans le savoir le destin de la jeune fille était entre ses propres mains, à elle de faire le bon choix.
Cha Yi lui avait déjà saisi sa chance en se laissant aborder, elle n'était pas idiote elle était de la même trempe que lui.